trou(v)er le tunnel, de venir pa(s)tou(s) ?

 

Je manque d’air.

 

Étrange assertion, étrange sensation, douleur insupportable mais non insurmontable d’un geste fait « à mon insu de mon plein gré » – on ne peut pas mieux définir le fonctionnement de l’inconscient que comme cela -…

 

Tous les jours, j’entends des horreurs, je traverse des contrées nauséabondes où les femmes et hommes s’entretuent, où certains s’égorgent, d’autres tentent de se suis-ci-dé avec des cachetons de pilules multicolores… Emballées en forme de dés.
Ils ont déclaré la guerre économique mais n’est ce pas plus économique de les tuer là (tu es là ?) sans se poser la question des conséquences… Si ce que je pense est ce que ça doit être, les autres doivent se sous-mettre… Sans se mettre les sous dans sa poche, bien évidemment, travailler plus pour… Gagner moins…

 

Je manque d’air et cet asphyxie mentale de cette prophylaxie généreuse des risques psychosociaux engendre d’autres sensations étranges…
Pourquoi ? Pour quoi ? Pour obtenir quoi ? Me demandent les patients continuellement… Même quand tout le monde sait que c’est absurde ?
Mr Hobbes, pourquoi les hommes sont ils des loups pour les hommes ?

 

Faut-il que nous autres psys devenions des patous, élevés parmi des moutons pour protéger les autres… Moutons ? Le mâle monte la garde en faisant des rondes et la femelle reste au sein du troupeau pour la fixer et le rendre moins fou ?
Il ne serait pas possible que certains deviennent des béliers ou des mouflons avec ces cornes majestueuses et encornent les loups qui, en meute, se jettent sur ce qui les rendent dingues, avides de sang et jouisseurs de pulsions les plus sauvages…
Et le berger là dedans, avec la bergère ?
Quelle civilisation peuvent ils tenir avec leur bâton de maréchal ?

 

Alors j’écris… en aparté…

Ce matin, les circonstances ont fait que j’ai du prendre le RER à une heure de pointe.
Je laisse filer une rame, pleine, boîte de conserve pleine de sardines tassées, l’huile a même du être supprimée pour y glisser encore plus de poissons.
J’en laisse filer une seconde…
Toutes les deux minutes, c’est un jour où la circulation est efficace…
Puis, je monte à la troisième, un peu plus vivable… Au fur et à mesure que le train s’enfonce dans les entrailles de la Ville, la densité augmente…
A toutes les grandes stations, la RATP a mis en place des régulateurs, avec leurs gilets pare-sardines et leurs gants en latex.
(en aparté : Les japonais avaient inventé cela il y a longtemps… À la différence que dans l’archipel, les trains s’arrêtent aux repères et les voyageurs s’alignent les uns après les autres et font silencieusement la queue).
Ces régulateurs sont les chiens de berger des temps modernes.

Ce matin, un de ces régulateurs dit :
« Avancez dans le couloir, y en a qui attendent ! Soyez pas égoïste, tout le monde doit aller bosser ! »
Habitué à obéir, personne ne répond.

Jusqu’au jour où y en aura un qui pètera un câble et le mouton mordra le chien.

 

Le train s’ébranle et une image me vient en pensées :
« Tu t’asphyxies en allant bosser, on te tue au boulot et tu agonises dans le train du retour… »

 

Oui je manque d’air et ce tunnel est un piège où comme celui du Mont-Blanc, le feu follet et fou peut nous tuer en nous grillant comme de vulgaires saucisses achetées au supermarché du coin…
J’ai envie de forer cette paroi, tout faire retomber, ensevelir ce tunnel et devoir reprendre la route à travers la montagne, sillonner les cols et les lacets, reprendre goût de l’effort simple et des plaisirs quotidiens…
Retrouver cette saveur ardente des émotions premières dont les sources sont intarissables de beautés futiles et légères…

 

Je manque d’air parce que le patou ne peut pas faire tout, il ne peut pas être partout et il en a marre de se faire bouffer pour défendre des moutons qui vont bientôt se faire tondre d’une part, se faire traire de l’autre et se plaindre à la bergerie.

 

S’il vous plaît. Pas tout… En tout cas… Pas d’un coup.
J’en ai marre de cette vie de chien.

 

post-scriptum : écrit après…

J’ai ouvert après ce texte, « L’actuel malaise dans la culture » de F.Richard dont une phrase m’a semblé lumineuse : L'(actuel) malaise est à la recherche de sa théorie… souhaitons-nous en trouver une…