j’veux pas la voir, j’l’oublie… car je refuse d’oublier de rêver

 

Oh miroir, mon beau miroir… Dis moi qui est la plus belle ?

Je me réveille en sursaut.
Quel cauchemar !

Je l’oublie.
Je ne sais pas pourquoi je l’oublie. Enfin, si, ça serait tellement mieux si je savais… où ça va… Ah, ça ira ça ira ça ira…

Elle est chiante, elle pleurniche, elle doit même être un peu attardée, ou du moins, pas très futée. Elle m’emmerde, elle dit toujours la même chose, elle fait ses questions et ses réponses, ses aller-retours sur le même chemin, la même rue, la même impasse dont je connais toutes les poubelles, les deux caniveaux dans les moindres détails, les trous d’égouts, les colonnes d’évacuation, les mégots, les rats, les crottes de chien… et ça dure depuis… des mois (mon esprit mal tourné ferait bien l’association suivante : d’émois, des moi etc… etc…).

Ouah…
Il est temps de remettre mon écoute sur le métier, d’aller chercher Piera… Reculer de deux pas, faire un saut sur le côté, faute de quoi je vais la mettre à la porte… Paf…

Je n’ai même pas besoin de me dire que j’ai envie de l’oublier, je l’ai oubliée. Je l’ai évacuée. J’ai tiré la chasse. J’ai fait vrombir le siphon. Pffffff…

J’ouvre les yeux, elle est toujours là, devant moi. Et merde. Encore ? Putain, je me plains, tu te plains par la barbichette… Le premier qui pleurera, ca sera sa fête. Casse-tête, casse bonbon, casse burnes… Je me casse !!!

Je referme les yeux, je ferme les oreilles, je pars…

« Vous êtes-là ? » Qu’elle me demande !

Et en plus de ça, elle viendrait même me re-chercher pour me ramener encore une fois dans ses contrées merdiques ?

 

—–

 

Bien sûr, ça ne dure pas chez moi. Heureusement pour mes patient-e-s…

Juste le temps de comprendre pourquoi ce contre-transfert- est si massivement négatif à ce moment- (oui, le moment de la relation psychique, l’instant du lien et la durée de l’écoute… oui, j’insiste sur ce «  » parce que c’est ainsi, un événement qui donne le « la« ) et qu’est-ce qui fait que j’en ai marre de me faire chier (dessus)… au-delà de la violence d’être scatologisé, scato-lobotisé, bref, d’être réduit à cette merde, d’identifier la restauration possible d’une élaboration transformatrice de cette violence… tutti quanti, tutti frutti, tutti… titi… gros minet.

Nous sommes bien d’accord. C’est un métier pour et de maso.

Mais ce qui me sauve, dans ce cas-, c’est que mon oubli n’est pas indexé sur une misanthropie comme je peux le ressentir dans d’autres situations.

Mon oubli est bien le refus de la maltraitance de ma pensée et de ma personne… J’oublie car je refuse d’oublier que je veux continuer à rêver.

Et ça y est, la vie reprend le dessus, en dépassant le doux fumet qui se dégage des mots énoncés par cette jeune femme en face de moi.