aérer

 

Je m’encroûte dit-il tendrement en regardant son visage devant ce miroir que sa grand mère lui a légué d’un lointain cousin russe à elle.
Je m’encroûte sous des apparences quotidiennes, je me lasse de mes simagrées qui révèlent des secrets enfouis…

J’ai ouvert les placards, j’ai pris ce que j’avais au fond des boîtes empilées de chaussures inutiles, je pense que je n’en ai plus besoin.

Je ne vois pas pourquoi j’en aurai besoin.

De ces boîtes à chaussures qui n’ont pas de réalités essentielles à exister là en cet endroit de la pièce là, couvertes de choses et autres achetées, chinées, empaquetées…

Crois-tu vraiment que les choses s’apaiseraient si les livres se refermaient sur leurs pages et se taisaient à l’infini, comme ces stigmates sur les corps que la parole et l’âme ne peuvent plus soigner ?

Avec le temps qui fuit, pourquoi décider de continuer sur ce chemin en sachant que celui ci ne m’excitera plus, que les odeurs et les saveurs ont déserté depuis si longtemps ?

Se rendre compte que chaque jour qui passe repousse la possibilité de changer cette impasse, revenir sur ses pas ou, si revenir sur ses pas est impossible – on avance on avance on avance c’est une évidence on a pas assez d’essence pour faire la route dans l’autre sens – on dynamite ce décor, le vieux Formica et les teintures mal vieillies des lustres d’antan dont on ne briquette plus parce que ce n’est pas ça… la chose dont on rêvait… imaginer que cette pièce sera toujours la même, que la scène sera toujours la même, les rideaux, les levers, le réveil… que cela se répète à l’infini de l’éternel s’enroulant comme les grands rouleaux de chez Saint Maclou… mon vieux clou… clown… il est triste et je ne vois pas pourquoi il ne le serait plus un jour, triste morne plaine…

Appuyer sur le détonateur n’est pas aisée, les briques qui s’envolent peuvent atterrir sur des terrains inconnus et neutres qui renvoient alors avec force l’incongruité de la chose… la déflagration est intense et les soubresauts de celle-ci est encore plus étonnante…

Je suis assis dans la foule qui passe, qui monte et descend dans ces couloirs pleins de tentations, acheter acheter acheter au moins chers des choses dont nous ne nous servirons peut être pas tant, utile ? Inutile ? Pas utile ? Plaisir réel ou plaisir suscité par les conditions et situations ? Qu’en sais-je ?
Je me suis posé au milieu de cette foule, je n’ai aucun désir d’acheter quoi que ce soit, peut être devrais-je tenter de me trouver quelque chose, un pull, un vêtement, un truc… mais est-ce que cela vaut la peine que je prenne mon temps pour cela ? Acheter ?

Les femmes et hommes défilent sous mes yeux, filent de plus en plus vite en file indienne sur ces escalators et ascenseurs qui leur permettent d’accéder au plus vite à la satisfaction de leur désir… marchand…