idées fixes

 

Il y a quelques mois, j’ai reçu un patient qui a été rendu malade par, dit-il, une « bande organisée de malfaiteurs ».

L’écoutant parler de son travail, je me suis bien rendu compte qu’il y avait, en effet, une « bande organisée de malfaitrices« . Certes, il avait eu le soutien de plusieurs personnes de son bureau, de plusieurs autres chefs qui se sont inquiétés de sa situation.

Pour lui, ses idées fixes, c’était d’être marqué à vie du sceau de lâcheté, celui de n’avoir pas pu résister à cette « bande organisée ».

De fil en aiguille, il s’est organisé lui, une « bande de bienfaiteurs » composée de médecins, de psychologues, de psychiatres qui l’ont soutenu dans cette traversée du désert vers un autre poste et, comme toute sa bande avait pensé la même chose, à savoir qu’il ne serait pas marqué du sceau de lâcheté, il s’en est remis.

Entre temps, la chimie ayant fait merveille, son psychiatre lui avait prescrit un médicament étonnant qui lui a ôté toutes ses idées fixes

 

J’imaginais ces idées fixes se fixant quelques parts dans quelques molécules chimiques parmi tous les neurotransmetteurs existants, se déposer dans une impasse synaptique de certaines cellules de Purkinje et se contenter d’un cul de sac neuronal… Pauvres idées encombrantes, reléguées au fond de la déchetterie chimique intersynaptique… Quand allaient-elles être recyclées ?

 

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Je pensais aussi aux miennes, des idées fixes… celles qui restent en mémoire, qui résistent et qui ne veulent pas être « mises au placard »… ces choses qui restent là, en suspens et dont nous ne savons pas qu’en faire…

 

Il m’arrive d’évoquer une « panne d’empathie », une panne d’imaginaire. Cette disparition de mes refuges intérieurs où je peux penser mes plaies, me retrouver, me ressourcer. Parfois, ces refuges sont dérisoires, ils ressemblent à des doux leurres qui ne me permettent pas de me protéger. Me protéger de la réalité trop envahissante et plus la réalité est vraie, plus il est facile de ne pas se fourvoyer. Mais qu’en savons-nous de ce que nous sommes réellement face au réel ?